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RÉSUMÉS DE QUELQUES ARTICLES

MUSIQUE NÉGRO-AFRICAINE1

PAR E. M. VON HORNBOSTEL

(Voir Africa, No. 1, p. 30.)

E but de cet article est de répondre aux questions suivantes: 1. Qu'est la musique africaine comparée à la nôtre? 2. Comment peut-on l'utiliser dans l'enseignement ou la religion?

Les réponses pourront être aussi brèves que les demandes: 1. La musique africaine et la musique européenne moderne sont basées sur des principes entièrement différents, et par suite: 2. On ne saurait les fondre ensemble; l'une ou l'autre doit être utilisée sans compromis.

I. PHONOGRAMMES

Notre vision, souvent imparfaite, a été complétée à l'aide de la plaque photographique ou du film, de même notre connaissance de la musique étrangère est basée sur le phonographe, c'est-à-dire qu'elle remonte au plus à une cinquantaine d'années; elle n'est donc ni étendue ni complète. Les quelques milliers de phonogrammes existant aujourd'hui dans les archives et les musées ne sont qu'un commencement de collection, ce sont des fragments dont on ne saurait encore tirer de vue d'ensemble. Or nous souhaitons par-dessus tout enregistrer la musique de tous les peuples du monde par le moyen du phonographe. Cela peut se réaliser sans grande dépense avec l'aide de personnes ayant l'occasion, comme les missionnaires, de se trouver en contact prolongé avec les indigènes.

Le phonographe, machine enregistrant les sons sur des cylindres, est supérieur au gramophone, qui enregistre les sons sur des disques, peutêtre avec de meilleurs résultats acoustiques, mais est aussi d'un maniement plus difficile. La technique est encore imparfaite puisqu'elle oblige le chanteur à chanter dans le pavillon de l'instrument, mais par contre celui qui recueille les morceaux n'a pas besoin de connaître la musique, l'appareil peut reproduire de suite ce qu'il vient d'enregistrer.

C'est seulement par le phonogramme que nous possédons la vraie mélodie sans qu'elle soit déformée par la notation européenne, c'est seulement par lui que nous connaissons le timbre de la voix et la manière d'articuler.

1 Le remarquable article publié dans le premier numéro de Africa par le Professeur von Hornbostel mériterait d'être intégralement traduit, le manque de place nous oblige à n'en donner ici qu'un résumé aussi complet que possible.

II. CARACTÉRISTIQUE GÉNÉRALE DE LA MUSIQUE NON-EUROPÉENNE

MÉLODIE CONTRE HARMONIE

La comparaison des différentes musiques a permis de constater que la nôtre est basée (depuis 1600) sur l'harmonie, toutes les autres sur la mélodie pure. Le rythme et l'harmonie existant dans les musiques non-européennes manifestent des caractéristiques résultant naturellement de la mélodie pure.

III. CARACTÈRE DE LA MUSIQUE NÉGRO-AFRICAINE

On arrive assez facilement à reconnaître et à distinguer la musique africaine de l'indienne et de la mélanésienne, mais c'est là le résultat d'une impression difficile à exprimer par des mots.

Dans l'exposé qui va suivre, on réservera la musique musulmane du nord, qui, bien qu'influencée parfois par les Nègres, se rattache cependant à la civilisation persane. On laissera aussi de côté la musique des pygmées sur laquelle nous ne possédons pas assez de documents. D'autre part, l'étude du sujet n'a pas encore été suffisamment poussée pour permettre d'établir des distinctions entre les tribus et même entre certains groupes importants comme les Bantous, les Soudanais et les Hamites. Cependant ces distinctions existent. Trois faits dominent la musique africaine, ils ont été remarqués par tous ceux qui ont entendus chanter des Nègres; ce sont: l'antiphonie, c'est-à-dire des soli et des chœurs alternés; les chants; et un rythme très développé. Ces caractéristiques ne sont d'ailleurs pas spéciales à l'Afrique, car on retrouve la première chez les Indiens de l'Amérique du Nord, la seconde parmi les habitants des mers du Sud, la troisième en Indonésie.

Dans presque tous les chants africains, un soliste alterne avec le chœur. Le premier se laisse aller à son inspiration et le chœur répète la nouvelle stance ou son refrain, ce qui atteste les hautes facultés musicales de la race.

Les formes typiques de la polyphonie africaine proviennent de l'antiphonie. Souvent le soliste commence une nouvelle stance avant que le chœur n'ait terminé la précédente. Cela se produit naturellement et n'était pas intentionnel à l'origine. Partout les chanteurs soutiennent la finale d'un air sans s'occuper du mètre ou de l'uniformité de la mesure, et par suite un soliste ne peut savoir d'avance combien durera la note finale du chœur. Le plus souvent la note finale et la note initiale d'un air se combinent. L'auteur étudie ensuite avec de nombreux exemples les différentes caractéristiques précédemment signalées par lui.

IV. AIR ET PAROLES

Mélodie et texte, musique et mouvements du corps forment à l'origine une inséparable unité. Sauf dans les âges avancés de la civilisation le vers parlé n'existe pas, on ne rencontre que le langage de tous les jours et le chant, c'est-à-dire le poème réglé sur des tons. Les mots et la musique viennent

ensemble à l'esprit du chanteur, ou plutôt l'air se forme avec la première stance et demeure le même durant les suivantes, changeant seulement pour s'adapter à un texte nouveau. Nous obtenons la même sorte de variations en adaptant des mots nouveaux à de vieux airs familiers. Dans la musique primitive le style est restreint, tous les chants paraissent avoir la même mélodie et diffèrent seulement en paroles.

Le langage et la mélodie ont une influence réciproque l'un sur l'autre, mais celle de la seconde est prépondérante, le premier, restreint, doit céder la place. C'est une expérience que nous enseignent nos chants populaires dans lesquels les syllabes courtes sont allongées et celles qui ne sont pas accentuées reçoivent une intonation forte, des syllabes explétives sont ajoutées, des mots, quelquefois des parties de mots sont répétés. L'intonation du langage se modifie dans le chant. De fait et même en dehors du chant, le discours lui-même a sa mélodie puisqu'il élève ou abaisse son diapason. Le diapason et par suite la mélodie du discours repose sur les voyelles et les sonores. Mais les sons individuels ne sont pas stables dans le diapason, ils glissent et c'est ce qui rend le discours différent du son. Dans le chant, chaque son est fixé à un certain niveau et de cette façon la mesure des intervalles est moins incertaine. De plus la mélodie du discours, son élévation et sa chute, peuvent être soutenue (par exemple l'élévation du ton à la fin d'une phrase interrogative en allemand). En fait elle l'est souvent, mais pas toujours, la mélodie chantée est plus régulière que le discours à cause de sa forme. C'est ainsi que dans la mélodie une seconde phrase doit, comme nous l'avons indiqué, s'adapter à la première qui a fixé le cours du ton chanté; ou bien la forme musicale exigera une baisse tonique à la fin d'une section, détruisant la mélodie naturelle de la phrase parlée, d'une question par exemple. Il est particulièrement intéressant d'étudier l'influence mutuelle de la parole et du chant dans les idiomes où les changements de diapason influent sur la signification des mots; les langues soudanaises en offrent un exemple remarquable. On s'attendrait chez elles à ce que le ton fut lié de très près au mot puisque tout changement dans l'inflexion de la voix altère ou même détruit la signification du mot. Dans le but d'approfondir cette question, un certain nombre de chants Ewe furent étudiés linguistiquement en 1902-3 par les Professeurs C. Meinhof et D. Westermann et au point de vue musical par le regretté Dr O. Abraham et l'auteur de ces lignes. L'exemple qui suit est extrait de cette enquête en commun encore inédite. Il s'agit d'une chanson de femme tournant en dérision la ville de Lomé: 'Dois-je épouser un homme de Lomé? (On dit qu')ils nourissent abondamment leurs épouses de farine de manioc (de qualité inférieure) et de noix de coco (vertes)!' Cette chanson fut chantée et les mots prononcés devant un phonographe par un indigène Ewe intelligent; les deux versions furent ensuite notées d'après les phonogrammes. Les notes du second ne représentent nullement des sons musicaux

semblables à ceux du premier, elles indiquent de façon approximative la marche de la voix suivant la mélodie. Une syllabe parlée semble avoir une qualité tonique distincte suivant qu'elle est simple ou répétée au phonographe, il est donc possible de déterminer son diapason comme pour une note chantée. Dans la transcription du texte les diapasons des paroles ont été indiqués par des accents: 'pour les hauts' pour les diapasons moyens ('Gàlf' est aussi prononcé 'gàli'); c'est-à-dire que la seconde syllabe a un diapason intermédiaire au lieu d'un diapason élevé, ‘yōná mè' est une contraction de 'yèwóná amè' (Westermann).

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Il est remarquable que les diapasons de la parole dans le phonographe et la transcription du texte ne concordent pas toujours. La raison en est très simple. Le chanteur n'a pas l'habitude de parler le texte qu'il vient justement de chanter peu avant. Le phonogramme parlé est donc encore étroitement

influencé par le chant. Mais une comparaison entre les mélodies de la parole et du chant montre que la mélodie chantée accorde difficilement quelque attention à la mélodie parlée. Seuls les premiers mots 'mákpó kásiá mádè' semblent fixer le ton. Mais le nœud musical ainsi créé réclame aussitôt une évolution musicale.

D'après cet exemple et d'autres semblables les diapasons de la parole semblent déterminer la mélodie mais n'ont aucune influence sur sa force créatrice innée; ce sont ces forces et non pas des qualités quelconques du discours qui déterminent le développement futur de la mélodie. Nous ne pouvons nous étonner de ce que l'auditeur ne se trompe pas sur le sens des mots même si le mouvement de la mélodie y est opposé. D'abord, dans la plupart des cas, la signification est probablement rendue évidente par le contexte, dans les mêmes conditions où nous comprenons ce que dit un étranger, malgré son accentuation défectueuse. Ensuite la mélodie du discours ne dépend pas seulement du passage de la voix aux différents diapasons, mais aussi de la clarté des sons. Enfin, même dans nos idiomes, les textes chantés sont toujours plus difficiles à comprendre que les textes parlés, et il est bien possible que ces difficultés soient encore plus considérables dans les langues où les diapasons sont un élément essentiel. La difficulté n'existe d'ailleurs que dans les chants nouveaux, car pour ceux que nous connaissons bien, nous imaginons les entendre distinctement et de façon correcte, quelque dénaturés qu'ils soient.

V. CONSÉQUENCES PRATIQUES

Dans la vie de ceux qu'on nomme 'primitifs', en particulier des Noirs africains, la musique et la danse ont un rôle infiniment plus important que pour nous. On ne les met pas à leur vraie place en les classant avec beaucoup d'ethnographes sous la rubrique: Arts et Jeux. Ils ne sont jamais de simples passe-temps ou des récréations. On ne considère pas qu'ils forment l'esprit à l'esthétique et on ne saurait les regarder comme un brillant décor de fête, ou comme des moyens de spectacle. Ils reposent au fond sur des bases psycho-physiques. Le mouvement du corps est libéré de l'effort par la répétition, il est monté dans une forme précise, et agit d'après ses propres lois et, à ce qu'il semble, de lui-même. Près de lui et comme partie de l'ensemble, le discours se forme en rythme et en ton. Ainsi la vie s'élève au-dessus de son niveau normal. Les mouvements sont délivrés de la contrainte qui, dans la vie ordinaire, les empêche de poursuivre leur but immédiat. La musique n'est jamais une reproduction (d'un morceau de musique existant) ni la production de quelque chose de nouveau, c'est la manifestation d'un esprit vivant qui travaille dans ceux qui chantent et dansent. Ils en ont conscience, et le sentiment d'être possédés ou inspirés donne à leur chant et à leur danse un caractère surhumain qui les met en

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